Régime d’accession à la propriété

Acheter sa première maison grâce au RAP

Martin Latreille a 33 ans. Il est actuellement au Costa Rica et magasine un terrain pour y construire un petit hôtel, qu’il appellera l’hôtel 514. Indirectement, « c’est un peu grâce au RAP », estime-t-il.

Le RAP peut faciliter l’achat d’une maison de deux façons. Pour ceux qui ont déjà des REER, le régime permet, à certaines conditions, de retirer les sommes cotisées afin d’avoir la mise de fonds pour la propriété, mais sans être touché sur le plan fiscal. Normalement, on est imposé sur les sommes que l’on sort de son REER.

« Ceux qui n’ont pas de REER peuvent toutefois, eux aussi, profiter du RAP », note Yannie Dupont, le courtier hypothécaire de Martin, chez Imeris.

Il suffit d’emprunter de l’argent à la banque, de cotiser cette somme à son REER et de la retirer 90 jours plus tard pour rembourser le prêt. La somme cotisée au REER permet ainsi de réduire son revenu imposable et d’aller chercher un remboursement d’impôt qui, selon la situation fiscale de chacun, peut parfois friser les 9000 $. Pour un couple, le montant est encore plus important.

C’est ce qu’ont fait Martin et son conjoint il y a quelques années, lorsqu’ils ont acheté leur premier condo, à Laval. 

« On n’avait pas d’économies. On pensait qu’acheter une propriété était inaccessible pour nous. »

— Martin Latreille, en parlant de son premier achat de condo

Ils ont alors fait leurs recherches, ont sorti la calculette et ont déterminé qu’ils pourraient obtenir assez d’argent en remboursement d’impôt pour se constituer une mise de fonds s’ils cotisaient à deux à leur REER, en empruntant. Ils ont donc « fait un RAP ».

Une fois emménagé, Martin s’est fait poser beaucoup de questions par ses amis. « Le RAP est peu connu des jeunes. Environ 90 % de mes connaissances ne savaient pas ce que c’était », raconte-t-il. Les données appuient ses observations. Au Québec, seulement 23 % des premiers acheteurs font appel au RAP pour financer leur propriété, indique une enquête publiée cet été par l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec.

« Le RAP gagnerait à être plus connu », croit Martin.

C’est qu’à peu près tous les jeunes premiers acheteurs ont quelque chose à gagner en passant par ce régime, même ceux qui ont déjà accumulé suffisamment d’épargne non enregistrée pour acheter. Ils peuvent alors utiliser le RAP pour bonifier leur mise de fonds et lui faire passer le cap des 20 % de la valeur de la maison.

« On évite alors de payer la prime d’assurance hypothécaire de la SCHL », illustre Nicolas Fréchette, conseiller principal en financement habitation chez Desjardins.

SE FORCER À ÉPARGNER

Un désavantage potentiel du RAP est de priver une personne du rendement qu’elle allait chercher avec ses REER, puisqu’elle doit « sortir » les sommes épargnées. En réalité, c’est rarement un problème, à moins d’avoir des investissements très lucratifs.

« Ceux qui utilisent le RAP pour grossir leur mise de fonds, par exemple, sauvent généralement de l’argent. »

— Daniel Laverdière, directeur principal, planification financière et services-conseils chez Banque Nationale Gestion privée 1859

« C’est qu’ils évitent une partie de prêt hypothécaire qui leur aurait coûté plus cher en intérêts que ce que leur épargne leur aurait rapporté », poursuit M. Laverdière.

« Dans mon cas, je n’avais pas d’épargne », rappelle Martin Latreille. Mais les règles du RAP l’obligent à remettre dans son REER les cotisations qu’il a utilisées. Il doit y déposer chaque année 1/15e de la somme retirée de son REER pendant 15 ans. C’est comme s’il s’était fait un prêt à lui-même, sans intérêt. « Dans mon livre à moi, c’est le meilleur prêt que l’on peut avoir », s’exclame-t-il.

« En plus de me permettre d’acheter mon condo plusieurs années plus tôt que je ne l’aurais pu, le RAP me force à épargner pour la retraite. Je fais donc d’une pierre, deux coups », ajoute-t-il.

Pour Martin, faire appel au RAP a donc été positif sur toute la ligne. Lorsqu’il s’est défait de son condo, il a utilisé l’argent obtenu pour acheter un triplex et un duplex. Et maintenant, toutes ses propriétés immobilières sont à vendre. C’est avec cet argent qu’il financera son projet au Costa Rica.

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